Zoé lava la tache sur sa robe. Sa mère entra alors qu’elle mettait des affaires dans son sac pour aller à la plage.
Perpétuellement désorientée devant sa fille, mère soumise, elle entama, d’une voix humide :
— Tu vas bien ma chérie ? Tu sembles un peu fatiguée. Tu ne te couches pas trop tard, j’espère ? Tu devrais être raisonnable. Tu as eu des ennuis récemment. Ce québécois, ta déception…
— Maman, ça suffit ! Je ne veux pas que tu me parles encore de ce type. Le sujet est clos. À présent, ce sont les vacances et tu ne vas quand même pas surveiller l’heure à laquelle je me couche !
— Non, non, ma chérie, je ne dis rien. Je m’inquiète seulement de savoir comment tu vas. Ton père t’embrasse très fort, il est parti tôt en bateau avec les Gambier. Il a pris son matériel de pêche et espère ramener un thon !
— Pourquoi n’es-tu pas allée avec eux ?
— Oh moi ! Tu sais bien que je souffre du mal de mer. Et avec ma sciatique, en plus… Et puis j’ai pensé que nous pourrions passer un moment ensemble, toutes les deux. On se voit si peu. Veux-tu que nous allions à Juan-les-Pins ? Nous prendrons la voiture de ton père.
Zoé n’avait aucune envie de la compagnie de sa mère.
— Non, je ne peux pas, mentit-elle, j’ai promis à Gustave de l’accompagner aujourd’hui. Nous voulons visiter le musée Escoffier.
— Alors, tant pis pour Juan-les Pins, « nous » resterons là, et à midi je vous inviterai tous les deux dans une pizzeria.
Zoé s’emporta :
— Maman ! Tu ne vas pas rester avec nous ! Cela serait gênant pour Gustave !
La maman se fâcha à son tour :
— Pourquoi cela le gênerait-il ? Je connais ce garçon depuis des années, je ne vois pas pourquoi ma présence le gênerait ! Dis plutôt que c’est toi que cela embête !
— Mais non, maman, tu dis n’importe quoi...
La mère de Zoé emballa les précieuses bribes de dignité qu’elle venait de gagner en jouant son rôle d’offensée, tourna le dos à sa fille et ferma furtivement la porte en s’en allant.
Dans l’escalier, elle croisa Gustave, lui lança : « ma fille vous attend ! » sur un ton amer et hostile.
Interdit, le jeune homme frappa à la porte de Zoé. Cette dernière était ravie de le voir, d’avoir quelqu’un en face d’elle qui l’écoute rager.
Elle crépita une grossière marmelade de contrariétés où s’embrouillaient sa mère, Pauli et Peggy-Jeanne...
Pourquoi Peggy-Jeanne, elle ne le savait guère. Elle lui en voulait indistinctement, comme si elle l’accusait de ne pas être restée avec elle la veille au soir, pour la soutenir lors de la défection de Pauli...
Gustave et Zoé partirent ensemble se baigner...
Peggy-Jeanne les aperçut et se dirigea du côté opposé.
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